La 5G en France dans les villes tests – Cela donne quoi?
Depuis plusieurs mois les opérateurs Orange, FreeMobile, SFR et Bouygues Telecom ont annoncé à grand renfort de communication les premiers résultats des tests effectués dans certaines villes équipées de tours de relais 5G. Si vous ne connaissez pas quelles sont les zones concernées par ces opérateurs, vous pouvez visualiser les différentes villes en phase de test 5G ici.
Au-delà des annonces commerciales, on peut se demander quelles sont les performances et les avantages pour les consommateurs ? Sur ce plan les opérateurs sont avares en informations et les testeurs ne publient aucune information sur le sujet. Nous avons donc opté pour une compilation des tests réalisés par des particuliers dans d’autres pays.
Quelles sont les fréquences de test 5G en France ?
| Petit rappel sur les fréquences : 700MHz : 4G 800MHz : 4G 900MHZ : Appels et 3G 1800MHz : Appels et 4G 2100MHz : 3G ou 4G 2600MHz : 4G 3600MHz : Test 5G |
Les opérateurs français comme la majeure partie des autres pays en phase de test ont opté pour des fréquences hautes non utilisées en extérieur. Suivant les autorisations de l’ANFR (Agence Nationale des Fréquences radios), ces derniers ont déployés des antennes entre 3600MHz et 3800MHz. Ainsi, ces essais n’ont aucun impact sur les réseaux classiques 3G / 4G existants mais il a été nécessaire de déployer de nouvelles antennes spécifiques pour la 5G.
3600MHz et 3700MHz – ondes à très courte portée
Tous les tests recensés sont catégoriques sur ce point, la couverture 5G en fréquences hautes a une portée très limitée. La puissance du signal décroit de manière spectaculaire à quelques dizaines de mètres des émetteurs en zone dégagée (dans l’axe de la rue par exemple). La chute des performances est encore plus flagrante si les testeurs se positionnent derrière un obstacle, un mur ou à l’intérieur d’un local commercial. Malgré cette chute de puissance de signal, les performances de la 5G restent largement supérieures à la 4G, en termes de débit.
Pourquoi effectuer les tests 5G en 3600 et 3700MHz ?
Vous pourriez vous demander pourquoi les opérateurs mobiles français ont choisi ces fréquences hautes pour tester la 5G si sa portée est si limitée ?
– Embouteillage des fréquences radios.
En réalité il n’y a presque plus de place dans le spectre radioélectrique en fréquences basses, les fréquences ont déjà été attribuées et sont déjà en cours d’utilisation, notamment pour la télévision Hertzienne, l’Armée, Gendarmerie, les communications aéronautiques et maritimes, le GPS, les radios FM, Etc., …
| Fréquences radios comment ça marche ? En termes simples, les ondes radios fonctionnent de la manière suivante : – A puissance d’émission égale, plus la fréquence est basse plus elle a une plus grande portée mais un débit data plus faible. – Plus la fréquence est haute, son débit de données sera élevé mais sa portée réduite. |
– Les fréquences hautes ont un débit de datas exponentiel.
Quitte à réaliser des essais, il est préférable de chercher le plus haut niveau de performance. A la spectaculaire vitesse de transfert de données des fréquences hautes, il faut ajouter la capacité de la 5G à prendre simultanément en charge un très grand nombre d’utilisateur sans connaitre de baisse de performances. Les opérateurs peuvent ainsi vérifier les capacités du réseau en termes de volume de connexion et de débit.
Performances de la 5G en test versus 4G ?
Sur ce point il n’y a aucun doute, tous les essais concordent, la 5G est 100 fois plus rapide que la 4G en fréquences hautes et 10 fois plus rapide en fréquences basses. Parmi les différents tests que nous avons parcouru, proche d’une antenne 5G, le débit est tout simplement impressionnant. Les annonces effectuées par les fournisseurs mobiles sont vérifiables en analysant le débit via une simple application « Speed Test », et dans la quasi-totalité des tests le différentiel de vitesse de transfert de données est de 1 en 4G pour 100 en 5G.
Vous pouvez donc considérer que le déploiement de la 5G représentera un changement technologique majeur incomparable au lancement de la H+ il y a quelques années ou de la 4.5G lancé récemment.
Antennes 5G, comment les reconnaître ?
Si vous résidez dans une des villes en phase de test de 5G et que vous avez la curiosité de voir à quoi ressemblent ces antennes, ne les cherchez pas sur les toits ou sur de grandes tours de relais de communication. Ces dernières sont bien plus petites, et du fait de leur faible portée elles doivent se trouver au plus près des utilisateurs, tels que fixées sur des poteaux d’éclairage public, des abribus, des colonnes publicitaires.
Comme tout lancement de nouvelle technologie, priorité à la validation des performances, l’esthétique est remise à plus tard… Par exemple, aux Etats Unis la course au déploiement de la 5G fait rage, et les éclairages publiques sont mis à contribution !
En France, les antennes 5G sont de différents types. Certaines sont directionnelles et ressemblent à de petits panneaux carrés, que l’on reconnaît grâce aux nombreux câbles visibles la connectant .
D’autres sont de type circulaire, omnidirectionnelle et fournissant le signal à 360 degrés :
Cependant les opérateurs travaillent sur de nouvelles solutions pour intégrer ces antennes dans le paysage urbain. A l’instar de la 3G ou 4G, ces antennes de proximité en fréquences hautes devront se trouver au plus près de la circulation piétonne et véhicule. Voici quelques exemples de ces « Small Cells » intégrées :
Que deviendront les grandes tours de relais GSM existantes ?
Une question légitime se pose, si la 5G testée nécessite de nouvelles antennes émettrices, quand sera-t-il des immenses tours de relais couvrant l’Hexagone ? La réponse est que ces dernières auront leur utilité lors du déploiement total de la 5G.
Revenons sur le principe physique des ondes radioélectrique, plus une fréquence est basse, plus sa portée est élevée, en revanche le débit de transfert de données est réduit. Comme nous l’avons mentionné plus haut, les essais réalisés en 3600 et 3700MHz affichent des performances en termes de débit surprenantes, en revanche la zone de couverture de ces nouvelles antennes est très réduite. Donc pour couvrir le territoire national, il faudrait déployer une nouvelle antenne tous les 100 mètres, soit des dizaines de millions de nouveaux relais. Ceci est tout simplement impossible.
Les opérateurs devront donc s’appuyer sur les tours de relais existantes en fréquences basses pour assurer la couverture globale de la France. L’ANFR, en coordination avec l’Union Européenne est en phase d’attribution des fréquences basses pour la 5G, ainsi la 700MHz, qui aujourd’hui est utilisée pour la diffusion de la 4G en zone rurale sera disponible pour le déploiement de la 5G. Vous trouverez ici la feuille de route ARCEP concernant les fréquences attribuées.
Que deviendront les autres fréquences en cours d’utilisation ?
Sur ce point les Autorités de régulation des fréquences radios n’ont pas encore tranché. Mais un scénario est envisageable, tout comme lors du déploiement de la 4G, certaines fréquences 3G et d’appels GSM ont été progressivement réattribuées en 4G. Par exemple, la 2100MHz entièrement dédiée à la 3G est actuellement aussi utilisée pour la 4G dans certaines zones. Autre exemple la 1800MHz initialement réservée aux appels GSM a été rapidement mise à contribution pour coupler le service des communications téléphoniques et 4G. Cependant nous ne pouvons fournir avec précision en cette fin d’année 2019 quelles seront les fréquences attribuées à la 5G.
A quand le déploiement de la 5G sur tout le territoire ?
Ceci est la grande inconnue, même si le lancement officiel est annoncé pour Juin 2020, cette date a déjà été repoussée à plusieurs reprises et pourrait l’être de nouveau. Ce report est dû aux facteurs suivants :
1/ Harmonisation des fréquences dans les divers pays européens.
Afin que le lancement de la 5G ne génère pas un grand capharnaüm radioélectrique sur le Vieux Continent, la Commission Européenne doit établir des normes harmonisées entre les pays membres, ceci prend donc du temps. Même si les 27 ont statués sur les fréquences hautes et la 700MHz, les négociations se poursuivent pour les plages utilisées en 3G et 4G.
2/ Enchères de l’ANFR pour l’attribution des blocs de fréquences 5G.
L’enjeu est crucial pour les opérateurs, plus vous obtenez de licences pour des blocs de fréquences plus vous pourrez prendre en charge un grand nombre d’utilisateurs. Afin d’assurer une équité entre les opérateurs et ne pas favoriser uniquement la société ayant le plus de moyens financiers l’ANFR Suit le cahier des charges suivant. Le processus d’attribution des plages de fréquences, sera effectué en deux temps : une première phase de distribution de blocs à prix fixe et une seconde phase d’enchères. Compte tenu de l’enjeu financier, la finalisation des attributions de blocs de fréquences est repoussé au printemps 2020.
3/ Les doutes relatifs aux fabricants d’équipements pour les tours de relais 5G.
Début Septembre 2019, le gouvernement Américains a émis des sanctions à l’encontre du fabricant chinois Huawey, concernant des suspicions d’utilisation de ces équipements à des fins d’espionnage. Les Européens leur ont emboité le pas sur ce point, mais il existe un réel problème, les autres fournisseurs de ces matériels et infrastructures 5G sont peu nombreux et leurs capacités de production limitées. Donc il y a un risque élevé que les opérateurs ne puissent déployer rapidement leur réseau 5G due à une pénurie d’équipements spécifique. A ceci il faut ajouter que le lancement de la 5G sera mondiale, la demande en tours de relais sera démultipliée par le nombre de pays souhaitant couvrir son territoire avec cette nouvelle technologie.
4/ En résumé, et nous nous basons sur le plan de bataille de l’ARCEP, le lancement commercial de la 5G aura lieu en Juin 2020 mais la couverture des principales zones urbaines et des grands axes de transport n’est programmée qu’en 2025… Autant dire que cette nouvelle technologie pour tous n’est pas pour demain.
La 5G en zone rurale, l’exemple de la Suisse
La Suisse est depuis deux décennies en pointe, en matière de télécommunications et de mise en service de nouvelles technologies. La 5G ne fait pas exception, les attributions définitives de plages de fréquences 5G est actée depuis le 08 Février 2019 alors qu’en France nous n’avons pas encore finaliser la procédure. Les opérateurs Suisses ont lancés leurs offres commerciales et déploient depuis des tours relais en 5G. Parmi les fréquences mises en service, la 700MHz a attiré notre attention. A l’instar des tests en France en 3600MHz, l’exemple Suisse nous permet de visualiser quelle sera la portée et le débit de la 5G en zone rurale. Les résultats sont impressionnants 200 Mégas de transferts de données en pleine forêt, avec deux barres de réception sur 5 disponibles, qui dit mieux ! En se basant sur ces résultats, et aux vues de la récente attribution de la 700MHz en France pour le déploiement de la 5G, nous pouvons espérer un débit performant dans les zones éloignées d’un grand centre urbain mais à l’instar de la Suisse, nous devrons patienter.
La 5G mettra-t-elle un terme à vos problèmes de réception appels et datas ?
Oui et Non… La 5G devrait résoudre les problèmes de connexions internet pour les utilisateurs se trouvant en limite de couverture 3G ou 4G. Certes, sans déploiement de nouvelles tours de relais, le signal sera toujours faible mais le débit de la 5G étant 10 à 100 fois supérieur à la 4G (le facteur multiplicateur dépendra de la fréquence utilisée). Donc si vous vous recevez un 1 méga à l’heure actuelle vous pouvez espérer connaitre une amélioration de 9 mégas, mais cela reste théorique et nous devrons attendre les premiers résultats du déploiement commercial de la 5G pour avoir des certitudes.
En revanche, les zones ayant une très faible couverture datas, intermittente ou inexistante, la 5G ne résoudra rien. Le changement de technologie ne modifiera pas les lois de la Physique, à puissance égale en 3G ou 5G une fréquence radioélectrique couvrira la même superficie. Ainsi, il n’y aura pas de miracle pour utilisateurs se trouvant en zone blanche ou ceux n’ayant pas une bonne réception à l’intérieur des bâtiments.
Pourquoi la 5G est-elle annoncée comme un tournant technologique ?
Il ne faut pas dénigrer le changement majeur que représente la 5G. L’utilisation des connexions internet augmente de manière exponentielle depuis près de 10 ans, non seulement via les smartphones mais aussi via tous les nouveaux objets connectés. Il est difficile de se faire une idée précise du besoin de connectivité de ces objets dans le futur et le grand public, très souvent, n’imagine pas toutes les nouvelles applications lancées dernièrement. Ces besoins touchent presque toutes nos activités, en voici quelques exemples :
- Transport – Voitures intelligentes.
- Sécurité privée – Protection de travailleurs isolés (détecteurs de chute, appels d’urgence automatiques), systèmes d’alarme, Caméras de surveillance.
- Santé – Aide aux personnes vulnérables (détecteurs de chute, appels d’urgence automatiques), Téléconsultations, Opérations chirurgicales assistées par vidéo.
- Industriel – Robotique (transmission datas de production – programmation des taches à distance), Entrepôts intelligents automatisés.
- Sécurité publique / Caméras de surveillance – Géolocalisation des véhicules, suivis des interventions pompiers / police en temps réels.
Dans ce contexte, la 4G ne pourra pas répondre indéfiniment à la demande globale de connexions au réseau internet. Sans le passage à la 5G, le déploiement de ces nouvelles applications sera ralentit.
Notre conclusion générale sur les tests de 5G en France
Il est indéniable que les tests en 5G sont très prometteurs, aussi bien en termes de débit que le nombre potentiel de connexions simultanées des utilisateurs et des objets connectés. Cependant l’empressement des opérateurs à communiquer sur le lancement de la 5G et des effets d’annonce a suscité d’immenses attentes auprès du grand public qui ne sont pas prêtes à être satisfaites. Il faut être clair sur ce point, les opérateurs ne sont pas prêts pour déployer la 5G à grande échelle rapidement. Le lancement commercial de la 5G en Juin 2020, s’il n’est pas repoussé entre temps, bénéficiera à une population limitée sur des zones très localisées. Ainsi vos smartphones passeront de la 5G à la 4G au gré de vos déplacements, la 5G globalisée sur tout le territoire n’est pas pour demain.
